C’est au lieu-dit Essieu, sur la commune de Saint-Germain-les-Paroisses, au cœur du Bugey, que se dresse le Château de Beauretour. Inscrit au titre des Monuments Historiques depuis 2003, le château plusieurs fois centenaire est en cours de restauration. C’est là que la « petite » histoire se mêle à la grande. Car Beauretour, aujourd’hui, c’est surtout l’épopée d’un homme, son propriétaire, Patrice Christin. Un passionné, qui depuis vingt ans consacre toute son énergie et son argent à l’entretien et la reconstruction de l’édifice.

  La passion de Patrice Christin pour le patrimoine remonte à 30 années en arrière. Dans les années 90, ce Savoyard cherche une ruine à restaurer et tombe sur Beauretour. L’engouement est quasi-immédiat, la passion vire à l’obsession. Il réussit à convaincre le propriétaire d’alors, M. De Seyssel, de lui vendre le château.

« Ce n’était pas un problème d’argent, mais de morale ; il me l’a cédé pour une somme symbolique. Il craignait que je me décourage et qu’il perde ainsi son dernier bien de famille dans la région ».

Son prévisionnel fonctionne à merveille, les 5 chantiers qu’il finance à 67% en fonds propres s’enchaînent. Il travaille comme un acharné à l’usine pour financer ses projets et ne compte pas ses heures sur le chantier. 160 m3 de maçonneries sont remontés. Petit à petit, il achète les terrains alentour, s’adonne au jardinage, à l’entretien des arbres fruitiers. « Cela faisait partie d’un tout. Je voulais vivre ma passion jusqu’au bout. On a n’a pas besoin de grand-chose pour être heureux, je voulais être libre », admet-il volontiers.

Patrice Christin se lance à corps perdu dans la consolidation et la reconstruction du château

Une recherche de liberté qui se heurte à un imbroglio juridique et réglementaire. Il y a deux ans, il comprend qu’on pourrait l’empêcher de poursuivre son rêve. Epuisé physiquement et mentalement, il sent qu’il touche le fond. Il doute, son optimisme vacille.

Aujourd’hui, Patrice Christin a retrouvé la force de continuer. Pour défendre ce lieu magique, dans un cadre naturel préservé. Amoureux de sa « ruine », il ne cesse d’en vanter les multiples atours. Car pour lui, Beauretour n’est pas qu’un lieu de pouvoir.

C’était aussi un lieu d’apparat, dont les aménagements successifs témoignent de l’enrichissement des seigneurs qui l’ont possédé. « Beauretour est une ruine très vivante, elle a conservé de multiples éléments d’architecture qui facilitent la lecture du bâti ». Il rêve de pouvoir l’ouvrir aux scolaires, aux étudiants, gratuitement, dans une volonté « de transmettre ». « Ici, c’est l’école de la vie » dit-il pour conclure.

On reste admiratif devant cet engagement ultime, la force de conviction de cet homme que rien ne semble pouvoir arrêter. Et les mots de Stefan Zweig* nous reviennent en mémoire : « Ce n’est que grâce aux exploits incroyables qu’elle accomplit que l’humanité retrouve sa foi en soi ».

* Magellan, de Stefan Zweig. Ed. Livre de poche.

Un peu d’histoire…

On attribue la construction de Beauretour autour de 1400 par un certain Jean Bovard, sur les terres de la Maison de Savoie, mais le site semble fortifié depuis le milieu du 12ème siècle.

L’édifice est un rectangle parfait de 1000 m2 environ, entouré de divers aménagements. Le bâtiment principal comporte, à chaque extrémité, une tour non saillante s’élevant à 17 m de hauteur. L’ensemble illustre l’architecture féodale finissante. Il comporte des éléments défensifs comme un fossé et un pont-levis.

Après la Révolution, le château est pillé et l’une des tours incendiées. Mais c’est surtout l’enlèvement des charpentes et couvertures au 19ème siècle qui le livre aux intempéries, fragilisant la construction et accélérant sa dégradation.

Fabienne Bouchage

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