Voilà un appareil important qui pourrait être issu d’une science imaginaire jamais dévoilée : la Vexométrie.

Pour les créateurs inspirés par cet instrument de mesure, il s’agirait de contrôler le degré de confusion qui peut surgir lors de rencontres désagréables ou d’échanges scabreux générateurs de vexations. Cela auprès d’interlocuteurs humiliés, blessés, froissés, persécutés, rendus mauvais, vengeurs et potentiellement agressifs.

Des situations fréquentes qui touchent tous les milieux, que ce soit dans les ambiances feutrées des salons diplomatiques, dans des discussions laborieuses de conseils d’administration, dans des échanges stratégiques, politiques ou même lors de repas de famille perturbés par les remarques déplacées d’un convive indélicat. Un de ceux qui n’hésiterait pas à vexer la maîtresse de maison en critiquant sa tarte à la courge alors qu’elle aurait mis tout en œuvre, de sa science culinaire, de ses soins et de son amour, pour accommoder les portions généreuses d’une grosse cucurbitacée. Un exemple de comportements impardonnables dont les conséquences pourraient entraîner des ruptures haineuses et durables au sein des familles aimantes. Tout ça pour dire que les animosités créées par des remarques vexatoires maladroites, souvent répétées, peuvent devenir incontrôlables et servir d’amorce pour allumer de nombreux conflits, des plus bénins aux plus tragiques.

D’où l’importance du vexomètre si d’aventure celui-ci venait à être créé par un bidouilleur de génie avant d’être largement utilisé.

     Mais réussir à réduire les débordements qui entachent les relations humaines, dans les situations les plus diverses, cela pourrait paraître complétement utopique. Surtout quand on connaît l’étendue du problème, avec la nature des égos surdimensionnés, la fragilité des susceptibilités et les abus de pouvoir de petits chefaillons teigneux qui mesurent mal les conséquences de leurs autorités nerveuses. Il en résulte que les victimes concernées en subissent les séquelles longtemps, lesquelles sont parfois difficiles à apaiser. Alors, pour remédier à ces déboires, on pourrait introduire le fameux vexomètre dont la technologie, compliquée, devrait s’appuyer sur des bidules électroniques. Comme ceux qui se multiplient partout, tout autour de nous, mais en les combinant afin de retrouver des modes de communications directes, issues de bonnes éducations traditionnelles. Pour sa fabrication on devrait établir un cahier des charges s’appuyant sur des modèles de comportements courtois entretenus par des zigotos chaleureux et très bien élevés. Donc un appareil multi usages aux pouvoirs relationnels élargis.

     Pour rendre le système efficace, il faudrait que chacun d’entre nous puisse porter, autour du cou, un petit vexomètre électronique pourvu d’une petite caméra et d’une mémoire illimitée. Le tout capable d’échanger avec tous les vexomètres rencontrés. A l’insu des propriétaires ils  communiqueraient entre eux de façon courtoise et construiraient, ainsi, des tissus relationnels importants au point de tous se connaître et de se reconnaître.

A titre d’exemple simple, Marcel pourrait très bien rencontrer Simone en ville, mais super grognon et mal tourné il ne lui adresserait pas la parole : elle en serait très vexée. Cependant les vexomètres, de l’un et de l’autre, se connaissant très bien, communiqueraient en échangeant des messages rassurants comme : « Ne fait pas attention, Simone, Marcel, fait la tronche car il sort de chez son dentiste mais il t’aime toujours autant, surtout ne te vexe pas ! ».

Ensuite Simone consulterait son vexomètre qui lui indiquerait que son signal est toujours au vert, loin de l’orange et très éloigné du rouge clignotant, donc rien de grave. Ainsi les choses s’apaiseraient immédiatement.

On pourrait multiplier les exemples à l’infini, sur des sujets beaucoup plus sérieux, pour imaginer que ce que les hommes ont oublié de faire, dans des échanges simples et bienveillants, directs et agréables, ce seront bientôt des systèmes électroniques, sophistiqués, qui prendront le relais. Un futur possible dans une humanité froide où seuls les machines électroniques, de type vexomètre, communiqueront. C’est bien dommage !

Paul Gamberini

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