Voilà ce que l’on peut ressentir de curiosité lorsque l’on s’attarde devant la vitrine d’une agence de voyage. Là où se dévoile la panoplie commerciale de belles images, d’offres et de programmes soigneusement élaborés. De tout ce qui peut nous transporter vers des rivages marins lumineux, des plages bordées de cocotiers ou vers des sites prestigieux camouflés, quelque part, dans les jungles profondes de destinations lointaines ou exotiques. Les choix sont sans limite et nous permettent de rêvasser un peu en laissant monter l’éveil de pulsions spontanées, capables de titiller nos désirs de changements et parfois même d’aventures exceptionnelles. Entre de petites escapades bien chouchoutées pour pépères gourmands, prudents ou craintifs jusqu’aux possibilités extrêmes de frissons, dignes d’un « Indiana Jones » bien campé : on trouve de tout.
Ce sont des moments de réflexions qui nous plongent dans un imaginaire enthousiasmant avant d’être rattrapés par les hésitations habituelles, portées par les froideurs glaciales de nos craintes ou de raisons dissuasives. Lesquelles viennent souvent contrarier des projets audacieux en évoquant des soucis matériels, des petites faiblesses de santé ou d’autres craintes dignes d’une passivité d’existence très casanière. Des tendances qui pourraient nous éloigner des propositions offertes, mais quelquefois il arrive que l’on force la porte de l’audace pour s’en aller vers un nouvel ailleurs.
La suite se passe au petit matin d’un premier jour, dans un aéroport en demi-sommeil, là où, poliment, on fait la connaissance d’un petit groupe de participants qui s’agglutinent autour d’un guide courtois et très professionnellement souriant. On écoute les premiers échanges entre ceux qui voudraient tout connaître de leur escapade et les blasés indifférents, durcis par l’endurance de leurs nombreux voyages. Parmi eux on peut chercher à identifier ceux avec lesquels on devrait pouvoir s’entendre, tout en participant à la composition d’une petite famille en devenir, destinée à vivre les mêmes découvertes pendant une ou deux semaines. Les dames, matinalement pomponnées abordent le séjour avec la grâce de leur présentation soignée alors qu’un grand bonhomme, déguisé en explorateur d’occasion, disparait dans un grand treillis vert couvert de poches, lesquelles doivent contenir tout un ensemble de survie, capable d’assurer les secours éventuels d’une compagnie entière : il est distant, froid, hautain et presque rassurant de stoïcisme. Quant aux plus égaillés ils se reconnaissent entre eux pour échanger les premières brèves d’un humour fraichement réveillé. Enfin un jeune homme triste et distant promène sa solitude en regardant autour de lui sans voir ni saluer personne. Comme le survol d’une âme sensible, peut-être celle d’un angoissé en lévitation quelque-part dans un espace nébuleux, à la manière d’un passager clandestin. Ce sont des caractères différents qui se groupent, peu à peu, pour aller s’embarquer.
Plus tard, arrivé à destination l’accueil est chaleureux, les valisent s’entassent dans un bus pour basculer ensuite dans le hall d’un hôtel. Le souci de la chambre précipite les voyageurs puis le repas de réception précède les premières recommandations et le séjour s’annonce, sous la responsabilité d’une guide locale qui bavarde, avec passion, un programme robuste de crapahuteurs. Les conditions sont presque spartiates, entre des levers tôt et des couchers tard car on est là pour tout voir et pour tout visiter. Puis les repas du soir nous rassemblent et c’est l’occasion d’écouter le grand bonhomme en treillis vert qui nous raconte tout de ses nombreux voyages sur tous les continents. Il nous dit avoir tout fait, du Nord au Sud et à l’entendre on à l’impression d’avoir un Dieu Créateur avec nous, que l’on promène dans toutes les églises et dans toutes les chapelles nombreuses de nos visites. On est dans les Pouilles, c’est très bien, mais voilà qu’une femme se met à tousser fortement dans le bus, ce qui inquiète beaucoup le grand bonhomme au grand treillis vert.
Et ainsi vont les voyages !
Paul Gamberini