Il existait, un millénaire en arrière, une façon de venir à bout de la résistance de tout accusé en lui appliquant le traitement suivant : On l’enserrait très fort à la limite de l’étouffement dans un habit de cuir mouillé, et puis on attendait que le vêtement sèche et se tende encore plus. En général, le pauvre supplicié renonçait à toute résistance et avouait les mots que ses tortionnaires désiraient qu’il prononce.
Parallèle un peu excessif quant au sujet de cet éditorial, mais tout de même….
Les communautés territoriales, les communes en particulier, subissent le joug de 400 000 réglementations et circulaires cernant tous les domaines de leurs activités, en particulier celles relatives à l’environnement, la sécurité et l’urbanisme. Mais aussi d’autres normes imposées par les fédérations sportives par exemple. Il leur faut débourser bon an mal an près de 700 millions d’euros de janvier à décembre. Il est bien question ici d’étouffement, et pour elles de se serrer la ceinture (de cuir…), n’est-ce pas ?
Sans compter les difficultés pour mener à bien un projet. D’ailleurs, le chef de l’état n’a-t-il pas lui-même constaté : « Il faut 27 jours pour bâtir un entrepôt aux États-Unis, 97 en Allemagne, 184 en France » ?
L’élaboration du dossier étant bien plus longue et laborieuse que la construction du bâtiment !
Ce sont les petites communes qui souffrent le plus amèrement de cette surenchère de normes. Dans le Bugey, beaucoup de maires lors de la présentation des voeux ont fait part au représentant de l’état de leurs inquiétudes devant les charges financières pesant sur leur ville ou village, doublées d’ailleurs du poids des responsabilités juridiques qu’ils assument…
Il semble que ce ras-le-bol de la base trouve quelque écho dans les sphères gouvernementales, puisqu’une commission consultative d’évaluation des normes a été désignée pour alléger ce fardeau.
L’idée circule dit-on de certaines dérogations possibles, dans certains cas… Mais les gouvernants ont horreur des dérogations…
Toutes ces normes ne sont pas à jeter au panier, la plupart sont de bons garde-fous contre les abus de tout genre mettant en danger la santé et la sécurité des personnes.
Mais de là à voir des hôteliers se battre pour que l’enfer des normes ne les plonge pas dans la faillite, à ce qu’une commune soit obligée de fermer son stade pour une question de surface des vestiaires…
Pour question d’hygiène, les toasts et les petits fours lors des réceptions officielles sont arrosés de détergeant pour qu’ils ne soient pas redistribués, comme les restes d’ailleurs dans les cantines.
Même les oeufs n’échappent pas au regard des législateurs : pour les oeufs durs, c’est un quart d’oeuf pour les enfants de plus de 18 mois en crèche, un demi- oeuf pour les enfants de maternelle, un oeuf entier pour les enfants de classe élémentaire, 1 à 1,5 oeuf au collège.
Vous allez rire, du moins vous allez payer… le capitonnage sur les murs des salles d’arts martiaux sera relevé de 50 centimètres.
Motif ? Les Français ont gagné quelques centimètres de taille, depuis le siècle dernier.
Le coût de cette mesure a été évalué à cinq millions d’euros pour les collectivités !
En fait, avons-nous vraiment « grandi » ?
Michel Bigoni