
Antoine Masset dans son grand tablier
Cette histoire, en fait s’est terminée en 1980, date à laquelle le café-restaurant Antoine Masset à Chazey-Bons a passé la main à la famille Carpin. Bien-sûr, la vie à Chazey-bons ne s’est pas arrêtée, mais a perduré sur un mode différent. Que l’on y songe : avant le village comptait trois cafés (Masset, Vannet, Brunet), deux épiceries (Collomb, Cavagna), une droguerie (Montillet), une boucherie (Mathieu), un cordonnier (Lyandra). Comme l’a chanté Charles Trenet : « Que reste-il de tout cela, dites-le-moi ? ».
La réponse est simple : une brasserie : l’Ô tenue par Alain Bouvet ! Toutes les autres boutiques ont refermé leurs volets pour toujours et dernièrement le café-boulangerie Carpin. En quatre ou cinq décennies, tout a changé et Chazey-bons a acquis par sa dimension territoriale, son regroupement avec Pugieu, la multiplicité des entreprises réparties sur sa surface, un rôle non négligeable… Oui, mais voilà, la vie d’avant si conviviale, foisonnante de relations humaines, qu’en reste-il ?
Le café- restaurant Masset
Antoine Masset est né en 1900 dans la plus ancienne famille de Chazey-Bons, répertoriée dès 1610 (date entre autres de l’assassinat d’Henri IV). Ses parents et sans doute ses grands-parents tenaient déjà là ce restaurant… Pour dire que ce lieu qu’il prit en charge était chargé d’un passé gastronomique de longue date. Il épousa Émilie, de la famille Tardy qui tenait un restaurant à Virieu-le-Petit. Étant d’un naturel plus effacé, elle se tint au fourneau avec un talent fou que nous dévoilerons dans un instant, Antoine se chargeant de l’accueil en sabots et grand tablier, c’est un grand privilège que d’avoir de l’âge et d’avoir connu cette époque.
Ils eurent une fille : Marguerite (Margot).
Tous les banquets du coin, les réunions, les assemblées, les grands moments d’une vie de village se déroulaient la plupart du temps dans leur restaurant. Le dimanche après-midi, le jeu de boules qui jouxtait l’établissement voyait s’affronter les gars du village dans des parties dignes des récits de Marcel Pagnol. Et les jeux se terminaient à l’apéro autour du bar (sans pass…).
Un menu de l’époque
Oui, un simple banquet en exemple, celui d’une Sainte Barbe en 1959, chez « Masset », où au fond des assiettes on pouvait chercher en vain la virgule en caramel si commune aujourd’hui dans nos assiettes de la nouvelle cuisine (si respectable soit-elle d‘ailleurs) …
« Médaillon de foie gras avec jambon, bouchées à la reine, brochet sauce mélusine, civet de lièvre saint Hubert, croûtons aux morilles, dindonneau rôti, salade de saison, fromages assortis, choux à la crème, macédoine de fruits, café et marc du Bugey… Le tout aux vins du Bugey et pétillant du Cerdon… » En gros, trois plats de viande (dont un brochet), trois plats recherchés avec foie gras, quenelles, morilles, avant fromages et desserts.
Et derrière le fourneau, une seule grande Dame : Émilie Masset… Et à l’accueil, un grand Monsieur rempli d’humour : Antoine Masset.
Michel Bigoni